Inflation explosive en France : quels impacts sur le retail ?

Guerre en Ukraine et crise énergétique obligent, l’année 2022 a été marquée par le réveil de l’inflation. En un an, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 5,9 % en France, atteignant même jusqu’à 6,2 % en octobre 2022. Une situation inédite, qui se traduit directement dans les comportements d’achat des consommateurs et contraint les acteurs du retail à adapter leurs stratégies.

Femme au supermarché analysant une bouteille de lait

Un réveil de l’inflation attendu

Avec près de 6 % de hausse enregistrée en 2022, l’inflation en France est bien loin des 2 % cible fixés par la Banque centrale européenne. D’autant que ce chiffre masque une réalité plus sévère encore : sur certains produits alimentaires, l’augmentation atteint 16,9 %. Et, dans le secteur de l’énergie, elle s’élève même à 19,2 %.

Une situation partagée par l’ensemble de nos voisins européens, qui se traduit par une consommation en baisse au sein de la zone euro. Malgré ce contexte inédit, les effets de la crise énergétique apparaissent toutefois plus modérés que prévu. Au quatrième trimestre 2022, en Europe, l’activité économique est ainsi resté globalement stable.

Quant aux Français, ils ont dépensé bien plus que les années précédentes. On observe en revanche une réorientation de leur budget. Au premier semestre, leurs dépenses se sont dirigées principalement vers les produits non-alimentaires, dans la continuité de la période post-Covid. Au second semestre au contraire, leurs achats se sont portés sur l’alimentation, compte tenu de l’accélération de l’inflation.

L’heure aux arbitrages budgétaires pour les consommateurs

Dans le contexte inflationniste actuel, les achats « plaisir » et shopping » se font, quant à eux, bien plus rares. Les consommateurs, fortement impactés par la hausse des prix, se soucient davantage de préserver leur trésorerie, quand elle existe, de couvrir leurs dettes ou de satisfaire leurs besoins primaires (manger, se loger…). L’indicateur de l’Insee synthétisant la confiance des ménages est ainsi tombé à 82, en décembre 2022, bien en-deçà de sa moyenne de 100 qu’il affiche sur la longue période. En début d’année, il culminait encore, en effet, à 99.

Or, si ce nouveau comportement des consommateurs est bien naturel, il se révèle aussi une mauvaise nouvelle pour les détaillants. D’après la CCI de Paris, pour 61 % de l’ensemble des commerçants, l’inflation a entraîné des répercussions, importantes, voire très importantes sur leur activité durant les dernières soldes de janvier : 46 % des commerçants évoquent ainsi unebaisse du pouvoir d’achat des consommateurs, 28 % un changement de priorité dans leurs dépenses, et 25 % une baisse de la fréquentation. Selon un sondage réalisé par Deloitte en octobre 2022, plus de 70 % des consommateurs se disaient par ailleurs inquiets de la hausse des coûts des achats quotidiens.

Un plan anti-inflation activé début mars

Dans ce contexte, le ministre de l’économie et des finances, de la souveraineté industrielle et du numérique, Bruno Le Maire, et Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des PME, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, ont annoncé la mise en place d’un « trimestre anti-inflation » début mars.

Celui-ci se traduit par de nouvelles marges de manœuvres accordées aux distributeurs. Ainsi, les produits qui seront vendus aux prix « les plus bas possibles » seront « choisis librement », et pourront varier d’une région à l’autre. Dans les rayons, ils seront identifiables grâce à un logo tricolore « trimestre anti-inflation« . Ces opérations commerciales porteront essentiellement sur les produits de marques de distributeurs.

En juin 2023, débutera une nouvelle vague de négociations, afin d’ajuster le dispositif. Selon le ministre, un ralentissement de l’inflation des matières premières et du fret maritime sont à prévoir au deuxième semestre.

Une accalmie prévue en 2024

Après la rapide et forte hausse de 2022, l’inflation devrait se stabiliser cette année autour de 6 %, un niveau toujours élevé. L’année sera marquée par deux périodes distinctes : un pic attendu au premier semestre, suivi d’une décrue progressive mais très nette, sur le reste de l’année.En glissement annuel, l’inflation descendrait alors à 4 % au quatrième trimestre 2023. 

Puis, en 2024 et 2025, la Banque de France annonce un niveau de l’indice des prix à la consommation pour les ménages français situé respectivement autour des 2,5 et 2,1 %.

Concernant la croissance, une très nette baisse est en revanche prévisible pour 2023, alors que celle-ci se situait à 2,6 % en 2022. Selon plusieurs publications économiques et premières prévisions estimatives, la stabilité économique devrait être de retour en 2024-2025, avec un premier retour à la hausse du PIB, à 1,2 % puis à 1,8 % d’ici trois ans.

En attendant, les acteurs du retail et du commerce dans leur ensemble devront donc s’habituer à une nouvelle expression : s’armer de patience.